30^ème festival de théâtre

Hanokh Levin, grand dramaturge israélien du 20ème siècle, a écrit des sketches, joués en cabarets satiriques et comiques, tout au long de sa vie. Ces formes brèves, d’une fulgurance cruelle et jubilatoire, sont autant de manières d’aborder la condition humaine et ses désenchantements. On rit, chez Levin, des gesticulations et des stratégies des personnages pour gagner une importance toujours vaine. Du monologue au duo ou au trio, Levin décale les situations quotidiennes, les angoisses de l’existence et la grande question politique, en humour noir burlesque et non-sens inéluctable. Des humiliations de Joyeuses Commères à la démonstration de cette femme qu’elle n’est pas une mouche, des rendez-vous sentimentaux manqués, au souvenir d’un mari qui ne veut toujours pas mourir, Levin pointe, non sans tendresse, les aspirations et les vicissitudes d’Êtres finalement désarmés devant leur humanité.

La Visite, c’est l’histoire de la rencontre d’un homme et d’une femme. Elle est psychiatre. Ce n’est pas un patient, il n’a pas rendez-vous. Mais est-ce juste une visite ?… Début de soirée. Le cabinet sombre de Viviane, neuropsychiatre, blonde, froide, à l’image d’une héroïne hitchcockienne. Elle s’apprête à sortir et n’attend personne. L’homme fait irruption. Le visiteur. L’importun. Elle ne le connait pas. Qui est-il ? Que lui veut-il ? On ne rend pas visite à n’importe qui, n’importe quand. Entre eux se joue très vite un jeu pervers qu’il met en scène. Chacun est à la fois bourreau et victime. Mais où cela les mènera-t-il ?

Dans cette pièce, l’œuvre artistique est omniprésente et rend hommage à Camille Claudel, artiste sculpteur, comme elle aimait à se définir elle-même. Trop souvent centrée, par le passé, sur son histoire d’amour tumultueuse avec Auguste Rodin, la vie de Camille est mise ici en lumière autour de sa personnalité, de sa passion pour ce métier que trop d’entraves auront tenté de rendre invisible. Insoumise Camille Claudel se veut être un temps suspendu sur la vie de l’artiste, en explorant sa farouche volonté de devenir et d’être elle-même, sans concession, sans compromis, dans une fidélité entière à son génie.

Entre étreintes et uppercuts, entre rire et drame, la pièce Ring de Leonora Confino pose cette question très contemporaine : comment coexister au quotidien avec l’autre sexe ? A travers une multiplicité de couples que représentent Camille et Camille, le spectateur sera le témoin des émotions, des fantaisies, des blessures qui s’engendrent dans les relations amoureuses, terriblement humaines. A quelques moments du spectacle, la chanson prendra le relais des mots.

L’histoire d’un homme Louis, de retour chez lui, dans sa famille, après de longues années d’absence, « pour annoncer, dire, seulement dire » sa mort prochaine et irrémédiable. Mais comment trouver les mots quand on est parti adolescent pour vivre sa vie loin d’eux ? Comment retrouver le chemin des siens quand on a seulement laissé le silence combler la béance laissée par l’absence ? Il y a, dans l’écriture de Lagarce, le style nerveux, sinueux et répétitif de ces idées, si souvent rêvées, tellement ancrées au fond de notre esprit, qu’elles refusent de sortir facilement. Pourtant devant la masse des non-dits accumulés par l’absence, la parole se libère, enfin, le temps d’un repas dominical. Mais, en définitive, quelle place restera t’il à Louis pour juste exprimer la fin de son monde ?

C’est une histoire d’amour à travers plusieurs conversations : sur l’idée d’avoir un bébé, les enjeux et les aléas du couple, la pollution, le terrorisme… faut-il s’abandonner au pessimisme ou croire en un monde meilleur ? L’auteur Duncan Macmillan met le doigt sur un malaise profond qui secoue toute une génération. Il explore, avec humour et sensibilité, la notion d’engagement et de responsabilité. Un texte bien construit, dans un langage efficace et stimulant pour l’imagination.

Des lettres adressées à Dieu par un enfant de dix ans sont retrouvées par Mamie Rose, la « Dame Rose » qui vient lui rendre visite à l’hôpital pour enfants. Elles décrivent douze jours de la vie d’Oscar pleins de personnages drôles et émouvants. Ces douze jours seront peut-être les douze derniers… mais grâce à Mamie-Rose qui illumine d’amour le destin d’Oscar, ces douze jours deviendront légende.

Une femme se livre à un étrange rituel et nous raconte des histoires d’amour. De toutes sortes. Drôles, sensuelles, vibrantes. Perdues, cachées, retrouvées. Des histoires vraies issues de la « récolte amoureuse » de Carole Fréchette aux quatre coins de la ville de Bruxelles. Elle insiste avec minutie sur tous les détails intimes : le cœur qui bat, le souffle court, la peau qui frémit sous les doigts… Tour à tour, elle évoque le souvenir de Siegfried, de Jan, d’Edmond, de Marguerite… Qui est-elle, cette femme au passé multiple et pourquoi raconte-t-elle tout cela ? Pourquoi parle-t-elle avec fébrilité, comme si elle était en danger, comme si son cœur, sa vie, sa peau en dépendaient ?